« Aujourd’hui, c’est très rare que j’en parle… J’ai presque l’impression que ça s’est passé dans une autre vie, que c’est arrivé à quelqu’un d’autre ».
Roger Auque a été correspondant de guerre au Liban puis en Irak, et grand reporter pour RTL, Paris-Match, Le Figaro Magazine, TF1-LCI. Le 13 janvier 1987, il est enlevé par le Hezbollah. C’est le début de près d’une année de captivité, que le journaliste raconte dans un livre, Un Otage à Beyrouth. Depuis janvier 2010, il est ambassadeur de France en Érythrée.
La captivité: « J’ai eu des moments forts dans ma vie. La captivité n’en fait pas partie. Ça a été une expérience très dure, mais j’ai vécu plein d’autres choses très fortes. Ça ne me pose pas de problème existentiel ou psychologique aujourd’hui ».
« C’est une question de caractère, ça dépend des personnalités de chacun. Moi, un truc qui a joué, c’est que je n’avais pas d’enfants. Certaines personnes ont raté les plus belles années qu’un père puisse avoir avec ses enfants. Psychologiquement, ça laisse des séquelles. Moi j’étais jeune, je n’ai eu des enfants qu’après, et je n’étais pas marié ».
« J’ai redécouvert la littérature pendant ma captivité. C’était un voyage mental intéressant, presque une retraite monastique forcée! J’étais plutôt optimiste, et je m’en suis bien sorti ».
Le retour en France: « Il a été très médiatisé. À mon retour, on m’a demandé de signer des autographes, c’était amusant. Mais il y a aussi eu beaucoup de jalousie, de méchanceté, de médiocrité dans certains blogs, certains articles de presse… Ça c’est calmé ».
L’après: « On relativise pas mal de choses. Avant, je ne croyais pas en Dieu, je suis devenu croyant en étant otage ».
« J’aime les défis. J’ai toujours été quelqu’un qui a voulu avoir plusieurs vies, plusieurs métiers, comme une sorte d’aventurier. Alors en 2003, j’ai ouvert un bureau à Bagdad. Ça m’a permis d’être connu en tant que grand reporter, et pas seulement comme otage ».
« Quand des Français ont été pris en otage en Irak, j’ai eu un peu peur. Je me suis dit: ‘Ça peut m’arriver à nouveau’. C’était assez étrange, j’avais l’impression de revivre le passé ».
Un nouveau défi en Érythrée: « L’Érythrée c’est incroyable, c’est un régime très difficile, entouré par l’Éthiopie, la Somalie et le Yémen. Pour moi, c’est un nouveau challenge ».
« Si je n’étais pas ambassadeur, aujourd’hui je serais sans doute à Kaboul ou Tripoli. Il faut couvrir ce qui fait la une de l’actu, aller là où il se passe quelque chose ».